Le Master Management du sport de l’Université Rennes 2, dirigé par Frédérique Roux, professeure des universités, vise à former des cadres travaillant dans les organisations sportives. Tout en restant général, le contenu de la formation est orienté vers le tourisme, les loisirs, l’innovation et les politiques publiques. Les managers peuvent exercer des fonctions de responsables stratégiques et opérationnels dans des organisations du secteur privé et public. La professionnalisation, au cœur de la formation, s’appuie sur de nombreux partenariats avec le monde socio-économique (collectivités territoriales, fédérations/ligues ou clubs, entreprises privées, établissements publics). Le Master est également adossé à un laboratoire de recherche, le VIPS2 (Valeurs, Innovations, Politiques, Socialisations et Sports).
Éric Journaux , lui-même diplômé de l’Université Rennes 2, titulaire du CAPEPS et du brevet d’Etat d’éducateur sportif 2e degré de canoé-kayak, commence sa carrière professionnelle comme professeur de sport sur un poste de conseiller technique sportif auprès de la fédération française de canoë-kayak, avant de rejoindre l’administration centrale du ministère des sports sur différentes missions liées aux sports de nature et au développement durable du sport puis au sein des cabinets ministériels. Face à une quinzaine d’étudiant·e·s, il a raconté ses différentes expériences et donné des conseils : “Ne vous mettez pas d’oeillères, pas de barrière, il faut naviguer au gré des opportunités. Je crois beaucoup à l’engagement, à la responsabilité.” Pendant une heure, il a répondu aux questions, expliqué l’importance de se construire un réseau et de sortir de sa zone de confort. Il nous en dit plus dans cette interview.
Quel a été votre parcours depuis que vous avez obtenu votre diplôme à Rennes 2?
Eric Journaux. Je suis allé en STAPS à l’Université Rennes 2 parce que le pôle France de Kayak, mon sport de prédilection, se trouvait à Rennes. J’ai suivi la filière enseignement, passé le CAPEPS en 1988, puis, j’ai fait mon service militaire comme professeur d’EPS à Saint Cyr Coëtquidan. J’ai été titularisé dans l’académie de Grenoble et nommé professeur d’EPS en Ile-de-France. En même temps, j’avais passé les diplômes d’État en canoë pour travailler et payer mes études. J’étais très investi dans la Fédération sportive, comme président de club en plus d’être sportif moi-même, et on m’a proposé de rejoindre la Fédération comme conseiller technique sportif dans le Centre-Val-de-Loire. En 1998, je rejoins la Fédération française comme directeur adjoint. Marie-George Buffet, alors ministre des sports, fait voter une grande loi, en juillet 2000, qui par voie d’amendement parlementaire instaure un titre dédié aux sports de nature. On me propose de travailler sur le déploiement de cette nouvelle loi qui permettait de reconnaître que les activités sportives en milieu naturel ont des problématiques similaires aux autres disciplines en matière de sécurité, de développement ou de compétition, et spécifiques puisque l’équipement sportif, plus ou moins aménagé, doit répondre à de nouveaux enjeux juridiques (par exemple, l'accès aux sites) et de préservation de l’environnement... Je rejoins le ministère en 2002. Les questions d’environnement et de développement durable prennent de l’essor, je deviens directeur de projet sur la dimension sport et développement durable. Chantal Jouanno, ministre de l’environnement, devient ministre des sports. Elle me sollicite pour intégrer son cabinet, ce qui me permet d’avoir une première expérience en cabinet ministériel. En 2012, je prends la direction du Centre de Ressources, d’Expertise et de Performance Sportive (CREPS) de Toulouse pendant sept ans. À la demande de l’actuelle ministre des sports, Roxana Maracineanu, j’intègre son cabinet en septembre 2019 et prends sa direction en juillet 2020. Je viens de quitter ma fonction pour devenir inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche.
Vous avez passé un diplôme de professeur d’EPS, mais finalement vous avez très peu enseigné. Quel est le trait d’union entre les différentes fonctions que vous avez occupées?
E. J. L'idée de faire travailler les gens ensemble pour transformer a toujours été un moteur pour moi, cela mène à la politique. Mais l'éducation a toujours été au centre de mon parcours. En juillet 2020, Édouard Philippe, le Premier ministre, quitte le gouvernement. Avec la ministre Roxana Maracineanu, nous pensons que ce serait une bonne chose d’intégrer un grand ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, dans une logique de continuité éducative. C’était un pari : le modeste ministère chargé des sports par ses moyens qui rejoint l’immense ministère de l’Éducation nationale pour renforcer notamment la place de l’éducation et de l’activité physique et sportive dans tous les temps de vie de l'enfant. Aujourd’hui, il faut renforcer et poursuivre l’effort. Globalement la place de l’activité physique et du sport dans la société est à revoir, à renforcer.
Il y a une deuxième caractéristique à mon parcours. Souvent, on oppose la formation académique générale, l’enseignement supérieur, à la formation professionnelle et technique. Je suis le produit de ces deux formations, menées de front, et l’une enrichit l’autre. Si je n’avais pas passé un diplôme d’État, je n’aurais peut-être pas terminé mes études universitaires par manque de moyens financiers. En termes d’employabilité, le fait d’avoir la compétence sportive, technique, professionnelle et la compétence académique permet de créer des parcours professionnels variés. Je préconise de ne pas opposer l’une à l’autre, mais l’une doit bien travailler avec l’autre. Il y a une architecture de formations dans le sport si complexe qu’il faut créer des synergies.
Qu’est-ce que votre formation vous a apporté ? Quels souvenirs gardez-vous de votre passage à Rennes 2 ?
E. J. J’ai fait mes études à Rennes 2 entre 1984 et 1988. J’étais très mobilisé par ma pratique sportive et associative. J’étais très sélectif, j’allais vraiment à l’essentiel, en faisant en sorte de ne pas traîner dans les études. Je garde le souvenir d’une grande diversité d’enseignements, de pratiques sportives. Il y avait des cycles plein air notamment : nous partions une semaine à la montagne, une semaine sur un voilier… On sentait que c’était dans les gènes de l’université. J’ai fait partie aussi de l’équipe de rugby universitaire : la pratique FSU ou SIUAPS est très importante dans la vie de l’étudiant. Cela crée du lien social, un esprit de communauté, d’équipe. Sans cela, dans les amphis et les TD, on se retrouve vite seul.
Éric Journaux échange avec les étudiant·e·s de master Management du sport rencontré·e·s sur le campus la Harpe, le 27 janvier 2022.
Avez-vous des conseils pour les étudiant·e·s inscrit·e·s actuellement en STAPS ?
E. J. C’est important d’avoir plusieurs cordes à son arc : s’engager dans une association, prendre des responsabilités associatives, passer aussi un diplôme professionnel. Les mises en situation professionnelle sont une force : on est confronté pour de vrai au chef d’entreprise ou au dirigeant d’association qui veut du résultat. Il y a sa propre pratique sportive qui peut ouvrir des portes : comme sportif, je participais à des évaluations, des protocoles, testés au CHU de Pontchaillou. C’était une richesse parce que cela permettait d’aller vers d’autres professionnels. Il faut être un peu audacieux.